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(texte juin 2014)
Les YPG, Yekîneyên Parastina Gel ou unités de protection du peuple ont été créées en 2004 après les massacres de Qamishli mais ne sont réapparues que lors du conflit syrien mi-2012 afin de défendre le territoire kurde. La création des YPG est liée au PYD, mais leurs officiers nient l'implication directe du parti dans leur action et déclarent n'avoir à cœur que de défendre le territoire kurde et sa population, au-delà de tout jeu politique.
Les succès militaires des YPG qui ont repoussé à la fois les forces du régime (à Kobane en 2012, sans effusion de sang majeure) et les groupes radicaux islamistes, notamment ISIL : Islamic State in Irak and Levant, une fraction dissidente et extrémiste d'Al Qaeda, leur ont valu un soutien populaire très large, et ont contribué à la popularité du PYD dans Rojava. On voit de nombreux drapeaux, autocollants, graffitis, affiches à leur nom, dans les taxis, les commerces, dans la rue, des badges au revers des chemises... Après l'offensive de l'été 2014 des jihadistes sur le Sinjar, les YPG ont réussi à sauver un grand nombre de Yézidis en les évacuant vers les zones sûres de Rojava.
Le KNC, lui, refuse de faire combattre sa branche militaire (en fait, les peshmergas d'Irak) au côté des YPG, ne leur reconnaissant pas le statut de force armée « officielle » des kurdes. Le parti demande à ce que le commandement des opérations militaires soit fait conjointement entre PYD et KNC comme le voulait l'accord de 2012.
Les YPG se sont placés sous l'autorité du gouvernement de transition lors de sa création en novembre 2013, tout en continuant à se déclarer officiellement indépendant du PYD.
Les YPG (hommes) et YPJ (femmes) sont composés de volontaires entraînés par des guérilleros chevronnés du PKK. Les cadres ont été formées au sein de la guérilla. Les recrues sont souvent très jeunes, mais depuis décembre 2013 le commandement des YPG s'est engagé à ne plus accepter personne en dessous de 18 ans. Sur le terrain, les visages sont marqués par le conflit, les traits sont devenus graves trop tôt. Mais les éclats de rire et les plaisanteries, une coquetterie vestimentaire, rappelle le jeune âge de ces combattants.
Dans un premier temps, les YPG ont recruté leurs membres dans les provinces syriennes, mais sans distinction d'origine : même si les kurdes y sont majoritaires, on y trouve aussi bien des arabes et des chrétiens, originaires des provinces kurdes ou ayant fait défection de l'armée syrienne.
En mars 2014 toutefois, face à un harcèlement de plus en plus dur de ISIL, le commandant des YPG a lancé un appel aux kurdes de toutes origines à les rejoindre dans leur combat. Cet appel a été relayé par le commandant militaire du PKK, Murat Karayilan, qui a appelé les jeunes des villes proches de la frontière avec Kobane à aller soutenir les efforts des YPG sur ce front. Un conseil des chefs de clan des villages arabes au sud du Kurdistan syrien a également décidé de soutenir l'action militaire des YPG face aux groupes extrémistes. Un grand nombre de jeunes et de combattants venant de Turquie ont donc grossi les rangs des YPG face à la menace jihadistes, devenue de plus en plus inquiétante après qu'ils aient saisi un grand nombre d'armes lourdes à Mossoul en juin 2014.
Dans la région d'Alep, où les YPG ne sont pas présents, c'est un groupe appelé le front Al Akrad qui assure la défense des populations kurdes, et combat aux côtés de l'armée syrienne libre, dont il faisait initialement partie avant de s'en détacher en raison du rapprochement de l'ASL avec la Turquie.
La guerre en Syrie n'est pas une guerre « technologique », mais une guerre à l'ancienne où chaque camp établi des points fortifiés, creuse des tranchées pour défendre ses positions et lutte de manière acharnée pour en conquérir de nouvelles. On se bat de village en village, parfois cantonné plusieurs jours au même endroit, parfois prenant ou reprenant plusieurs lieux dans la même journée.
Les équipements sont simples : fusils d'assaut, RPG, mortiers, canons de DCA montés sur les plate-formes des pick-up ou des camions. D'un côté comme de l'autre, les belligérants disposent de quelques tanks récupérés du régime. Une bonne partie des combats à également lieu en milieu urbain.
Dès lors, ce sont les choix stratégiques des commandants militaires et l'entraînement des troupes qui font la différence au combat. Les membres des YPG reçoivent un entraînement militaire accéléré, mais aussi une formation idéologique. Ses membres déclarent défendre les idées du leader du PKK Abdullah Ocalan . Pour les jeunes sur le terrain, cela se traduit par la conviction de défendre leur peuple, de défendre une nouvelle société révolutionnaire basée sur des valeurs humanistes de gauche, et enfin de participer à un combat global pour la liberté des peuples. Ce sont ses aspects qui attirent aussi de non-kurdes vers les YPG, comme étant la force armée du conflit avec les meilleurs principes dans tout le conflit.
En ce qui concerne la sécurité intérieure, une autre force a pris le relais des YPG, les Asayish. On intègre les Asayish sur la base du volontariat. Chaque personne désireuse de participer à la protection de la communauté peut y adhérer. Elle reçoit alors un entraînement militaire et une éducation juridique accélérée. Les Asayish se sont placés sous l'autorité du ministère de l'intérieur du nouveau gouvernement dès sa formation. Ils tiennent les checkpoints sur les routes et à l'entrée des villes et villages kurdes et mixtes, assurent le travail de police. Pour un étranger, il faut obtenir auprès d'eux un permis de circuler, car en dehors des rares zones tenues par le régime, de quelques quartiers syriaques ayant leur propre milice et de certains villages arabes qui organisent eux mêmes leur défense, ils sont présents sur tout le territoire. Leurs locaux sont clairement identifiés, ils ont un uniforme homogène, un drapeau à la couleur bleu ciel et une adhésion assez large de la population.
Encore une fois, les détracteurs du PYD l'accusent de pratiques autoritaires et se servir des Asayish pour intimider leurs opposants. L'organisation Human Rights Watch, après une visite et des entretiens dans le canton de Jazireh au Kurdistan syrien, souligne la bonne volonté des YPG à être transparents et leur laisser accéder aux prisons pour en constater l'état et vérifier les allégations de pratiques autoritaires. Ils relèvent qu'il n'y a apparemment plus de prisonniers politiques. Sans se prononcer pour l'un ou l'autre camp, le groupe note également que certains prisonniers pour des délits de droits communs peuvent tenter de faire passer leur incarcération pour un fait politique.